Déclaration de TVA pendant un redressement judiciaire : la question se pose dès que l’entreprise entre dans cette phase critique.
Entre incertitudes fiscales, échéances pressantes et documents à remplir, beaucoup de dirigeants se retrouvent perdus.
Ce guide vous donne les règles essentielles à connaître pour continuer à déclarer correctement votre TVA, éviter les erreurs coûteuses et rester en conformité tout au long de la procédure de redressement judiciaire.

TVA et redressement judiciaire : ce que dit la loi
Lorsqu’une entreprise est placée en redressement judiciaire, cela ne signifie pas la suspension de ses obligations fiscales.
Bien au contraire.
Selon l’article L.622-17 du Code de commerce, les dettes nées après le jugement d’ouverture doivent être payées à leur échéance.
Cela inclut la déclaration et le paiement de la TVA, qui restent des obligations prioritaires.
L’administration fiscale distingue deux types de créances dans ce contexte :
Les créances antérieures : elles sont gelées et intégrées au passif de la procédure. Leur traitement relève du plan d’apurement proposé au tribunal.
Les créances postérieures : notamment la TVA générée après le jugement, doivent être acquittées normalement. Leur non-paiement peut compromettre la procédure en cours.
👉 Cela signifie concrètement que l’entreprise doit continuer à déposer ses déclarations de TVA (CA3), dans les délais habituels, sous peine de sanctions fiscales.
📌 L’administration considère ces créances comme “exigibles de plein droit”, ce qui signifie qu’elles ne peuvent être incluses dans un plan de redressement si elles ne sont pas réglées dans les temps.
Faut-il faire une déclaration spéciale le mois du jugement ?
C’est une question fréquente chez les dirigeants : doit-on déposer deux déclarations CA3 le mois où le jugement de redressement judiciaire pour une entreprise est prononcé ?
La réponse est claire : non. Une seule déclaration suffit, mais elle doit être adaptée au contexte du redressement judiciaire.
La déclaration CA3 avant, pendant et après le jugement
Le mois du jugement, il faut :
Déposer une seule déclaration CA3, comme d’habitude.
Distinguer clairement la TVA relative aux opérations réalisées avant le jugement et celles effectuées après.
Indiquer le montant de TVA non encore reversé avant jugement : ce montant sera intégré au passif de la procédure.
Régler la TVA exigible après jugement dans les délais habituels.
Cette distinction est essentielle, car elle permet à l’administration fiscale de traiter différemment les créances selon leur nature juridique.
Cas pratique : déclaration en milieu de mois et mentions obligatoires
Prenons l’exemple d’un jugement rendu le 10 mars. L’entreprise doit alors :
Comptabiliser la TVA sur les ventes du 1er au 10 mars dans le passif (créance antérieure).
Déclarer la TVA sur les ventes du 11 au 31 mars comme une créance postérieure, à régler dans les délais.
Il est vivement recommandé d’ajouter une mention claire sur la déclaration ou par courrier joint, comme :
« Jugement de redressement judiciaire prononcé le [date]. TVA avant jugement intégrée au passif. TVA postérieure déclarée pour paiement. »
📌 Un oubli ou une mauvaise affectation peut entraîner des redressements fiscaux et des pénalités, même en période de redressement judiciaire et conséquences pour les clients.
TVA sur créances irrécouvrables : peut-on la récupérer ?
Lorsqu’une entreprise est en redressement judiciaire suite à une cessation de paiement, elle peut se retrouver face à des clients insolvables.
Peut-elle récupérer la TVA déjà reversée à l’État sur des factures impayées ?
La réponse est oui, sous certaines conditions strictes.

Comment rectifier ses factures et émettre des avoirs légalement ?
La législation permet de récupérer la TVA sur une créance devenue irrécouvrable, notamment lorsque le client est lui-même en procédure collective.
Pour cela, il faut :
Émettre une note d’avoir correspondant à la facture impayée.
Mentionner le redressement judiciaire du client dans le motif de régularisation.
Faire apparaître cette rectification dans la déclaration CA3 correspondante.
⚠️ Attention : il ne suffit pas d’avoir un impayé. Il faut que l’irrécouvrabilité soit officiellement constatée, notamment par un jugement de rachat d’une entreprise en redressement judiciaire ou liquidation.
TVA sur les créances postérieures : attention aux pièges
La TVA due sur les opérations réalisées après le jugement de redressement judiciaire est une créance postérieure.
Elle n’entre pas dans le plan d’apurement du passif.
Elle doit être payée dans les délais habituels, sous peine de mettre en péril toute la procédure.
Distinction entre dettes avant et après jugement
Beaucoup de dirigeants confondent les deux.
Pourtant, cette distinction est fondamentale :
Les dettes antérieures au jugement : gelées, elles font partie du plan de redressement soumis au tribunal.
Les dettes postérieures : considérées comme prioritaires, elles doivent être payées normalement.
Cela signifie que la TVA collectée sur des ventes après le jugement doit être reversée au Trésor sans retard.
Aucun moratoire n’est prévu.
📌 Un oubli ou un retard peut entraîner la conversion du redressement en liquidation judiciaire.
Ce qu’un dirigeant ne peut pas se permettre d’ignorer
Voici ce qu’il faut impérativement éviter :
Payer d’autres créanciers avant l’État sur les créances postérieures.
Confondre dates de facturation et dates de paiement : seule la date de l’opération compte.
Omettre les mentions spécifiques liées au jugement sur la déclaration CA3.
Un exemple concret : un dirigeant facture une prestation le 15 avril, alors que le jugement de redressement date du 10 avril.
Cette TVA est postérieure, elle doit être déclarée et réglée à échéance.
👉 Ignorer cette règle expose à des sanctions fiscales et à une mise en cause de la responsabilité du dirigeant.
Que faire si vous ne pouvez pas payer la TVA due ?
En période de redressement judiciaire, les tensions de trésorerie sont fréquentes.
Pourtant, la TVA postérieure au jugement doit impérativement être réglée.
Que faire lorsqu’on est dans l’impossibilité de la payer ?
Des solutions existent, mais elles doivent être engagées rapidement et avec méthode.
Plan d’apurement, délais, dialogue avec l’administration
Même si la TVA postérieure ne peut pas être incluse dans le plan de redressement, un plan d’apurement spécifique peut être négocié directement avec le SIE (Service des Impôts des Entreprises).
Pour cela :
Contactez votre SIE dès la première difficulté.
Demandez un échelonnement exceptionnel de la dette de TVA.
Justifiez votre situation avec des pièces comptables précises : trésorerie, prévisionnel, calendrier de règlement.
📌 Les services fiscaux sont souvent ouverts au dialogue lorsqu’ils sont contactés en amont. L’inertie est en revanche sévèrement sanctionnée.
Quand et comment demander une remise de pénalités ?
Les pénalités de retard sur TVA peuvent parfois être remises partiellement ou totalement.
Cette remise n’est jamais automatique.
Il faut :
Présenter une demande motivée.
Mettre en avant des circonstances exceptionnelles : redressement judiciaire pour un salarié en CDI, perte de clients majeurs, blocage bancaire.
Joindre les documents nécessaires (jugement, bilan, échéancier).
⚠️ Il est important de noter que la TVA elle-même ne peut pas être annulée, seules les majorations et intérêts peuvent faire l’objet d’une remise.
💬 Un avocat fiscaliste ou un expert-comptable peut grandement faciliter ces démarches et éviter des erreurs lourdes de conséquences.
Bonnes pratiques pour éviter les erreurs fiscales
Gérer une entreprise sous redressement judiciaire est déjà un défi.
Ajouter à cela les contraintes fiscales sans soutien peut vite devenir un casse-tête.
Pourtant, certaines pratiques simples permettent de limiter les risques liés à la TVA et de garder le contrôle.
3 réflexes à adopter dès l’ouverture du redressement judiciaire
Informer rapidement votre SIE du jugement : cela permet d’adapter les échanges et d’obtenir des précisions sur les déclarations à venir.
Mettre à jour votre comptabilité sans délai : distinguez bien les créances avant et après jugement.
L’erreur fréquente est de mélanger les écritures, rendant les CA3 incohérentes.
Planifier vos déclarations CA3 avec anticipation : ne pas attendre le dernier moment permet de repérer d’éventuelles anomalies, surtout en cas d’émission d’avoirs pour créances irrécouvrables.
L’aide précieuse d’un expert fiscal ou avocat spécialisé
🔍 Un expert-comptable ou un avocat en droit fiscal peut vous éviter des pénalités importantes :
En vous aidant à formuler les mentions adaptées sur les déclarations.
En gérant pour vous la récupération de TVA sur créances irrécouvrables.
En préparant un plan de négociation avec le SIE si besoin.
👩💼 Exemple : une gérante de boutique a évité 12 000 € de pénalités en faisant accompagner ses déclarations par un cabinet fiscal, qui a négocié un échelonnement sur 6 mois.
Ne restez jamais seul face à la complexité de la TVA en période de redressement judiciaire et conséquences pour les clients : des solutions existent, et une simple erreur peut coûter cher.

Conclusion
La gestion de la TVA pendant un redressement judiciaire demande rigueur, anticipation et connaissance des règles spécifiques.
Il est essentiel de bien distinguer les créances antérieures, à intégrer au passif, des créances postérieures, à régler sans délai.
Le bon réflexe reste de dialoguer rapidement avec le SIE et de s’appuyer sur des experts pour sécuriser vos déclarations.
Si vous êtes dirigeant et que vous traversez une période critique, ne laissez pas la déclaration de TVA pendant un redressement judiciaire devenir un facteur aggravant.
Agissez dès maintenant pour éviter les erreurs fiscales et protéger la continuité de votre activité.