Dépôt de bilan d’une entreprise individuelle : une décision souvent redoutée, mais parfois inévitable.
Lorsque les dettes s’accumulent, que les charges deviennent insoutenables et que les rentrées d’argent ne suivent plus, l’entrepreneur peut rapidement se retrouver dos au mur.
Dans cet article, vous découvrirez les procédures possibles, leurs conséquences sur votre patrimoine personnel, les démarches à suivre, et les solutions pour réagir efficacement – même en urgence.

Comprendre ce qu’est un dépôt de bilan pour un entrepreneur individuel
Le dépôt de bilan, pour une entreprise individuelle, signifie officiellement que l’entrepreneur reconnaît être en cessation des paiements : il ne peut plus régler ses dettes avec son actif disponible.
Cette situation déclenche l’obligation de saisir le tribunal dans un délai de 45 jours.
La notion de cessation des paiements
Ce terme juridique désigne un déséquilibre entre :
les dettes exigibles (factures, charges, salaires, etc.)
et la trésorerie réellement mobilisable (en banque ou rapidement liquidable)
Un découvert ponctuel ne suffit pas, mais si vous repoussez continuellement vos paiements ou que vos charges écrasent vos recettes, le dépôt de bilan devient nécessaire — voire obligatoire.
Quand et pourquoi déposer le bilan ?
L’entrepreneur individuel doit faire cette démarche lui-même, en déposant une déclaration de cessation des paiements auprès du tribunal de commerce (ou judiciaire si activité libérale).
Cela permet au juge d’ouvrir une procédure collective : redressement, liquidation ou rétablissement professionnel.
À noter : en cas de difficultés touchant les employés, le dépôt de bilan et les salariés concernés sont étroitement liés, notamment en matière de rupture de contrat, de préavis ou d'indemnisation.
À retenir : déposer le bilan n’est pas un aveu d’échec, mais un acte de gestion responsable, qui peut vous protéger légalement.
Illustration : un artisan plombier dépassé par ses charges sociales
Jean, artisan plombier en entreprise individuelle, voit sa trésorerie s’effondrer après plusieurs mois de chantiers impayés.
Les cotisations URSSAF et fournisseurs s’accumulent. Malgré les relances, il n’arrive plus à faire face.
Il dépose le bilan dans les temps et obtient une liquidation judiciaire simplifiée, limitant l’impact sur sa vie personnelle.
💡 Dans des cas similaires, l’impact sur les cotisations peut poser question. Consultez notre page dédiée aux dettes URSSAF et dépôt de bilan pour comprendre les enjeux.
Quelles procédures s’offrent à une entreprise individuelle en difficulté ?
Contrairement aux idées reçues, le dépôt de bilan d’une entreprise individuelle n’aboutit pas systématiquement à une liquidation.
Selon votre situation financière, plusieurs procédures sont envisageables, avec des conséquences très différentes.
Rétablissement professionnel : une procédure sans liquidation
Réservé aux entrepreneurs sans salarié et sans patrimoine immobilier, le rétablissement professionnel permet d’effacer les dettes sans passer par la liquidation judiciaire.
C’est une solution rapide, sans vente de biens, ni fichage Banque de France.
Idéal si vous avez peu de dettes et que votre activité est déjà arrêtée ou irréversible.
👉 Ce type de procédure est souvent méconnu mais peut éviter un dépôt de bilan avec licenciement économique si l’activité n’emploie aucun salarié.
Redressement judiciaire : possible mais exigeant
Si l’activité peut être sauvée, le juge peut ouvrir un redressement judiciaire.
Cette procédure permet de :
Geler les dettes
Rééchelonner les paiements
Continuer l’activité sous contrôle judiciaire
Mais attention : cela implique un suivi strict, la présence d’un mandataire judiciaire, et une capacité réelle de rebond. L’échec du redressement conduit souvent à une liquidation.
Liquidation judiciaire : quand il n’y a plus d’autre choix
Si aucune solution ne permet de redresser l’activité, le juge prononce une liquidation judiciaire.
Cela signifie :
Fermeture immédiate
Vente des actifs
Rupture de contrats en cours
Radiation de l’entreprise au registre
📌 Le dépôt de bilan avec indemnités pour les salariés devient alors un enjeu crucial pour assurer une transition humaine et financièrement encadrée.
Exemple : un micro-entrepreneur dépassé par ses dettes peut être liquidé, même s’il n’a pas de salariés. Cela reste une procédure lourde mais encadrée, qui ouvre parfois droit à un effacement partiel de dettes.
Que risque l’entrepreneur individuel ?
L’un des aspects les plus redoutés du dépôt de bilan d’une entreprise individuelle, c’est l’impact personnel. Contrairement aux sociétés, il n’y a pas de séparation juridique entre l’entreprise et l’entrepreneur.
Cela peut entraîner des conséquences directes sur le patrimoine privé.
Patrimoine personnel engagé : quelles protections existent ?
Par défaut, l’entrepreneur individuel est responsable sur l’ensemble de ses biens, y compris son logement personnel, ses véhicules, ses comptes, etc.
Sauf exceptions, les créanciers peuvent saisir ces biens pour récupérer les sommes dues.
Bon à savoir : la résidence principale est protégée automatiquement depuis 2015, mais les autres biens ne le sont pas.
ℹ️ En matière de droits, le dépôt de bilan et le droit du salarié sont également un point d’attention, même pour les indépendants travaillant avec des prestataires.
Déclaration d’insaisissabilité : utile si faite à temps
Avant 2015, il était nécessaire de faire une déclaration notariée pour protéger ses biens personnels (terrain, résidence secondaire…).
Cette protection reste valable aujourd’hui pour les anciens biens ou pour renforcer la couverture juridique.
Si vous n’avez pas anticipé cette démarche, vos biens restent vulnérables en cas de liquidation.
Le cas spécifique du micro-entrepreneur
Même si le régime micro-entreprise simplifie la comptabilité, il n’annule pas la responsabilité personnelle.
En cas de dépôt de bilan, le micro-entrepreneur engage ses biens comme n’importe quel entrepreneur individuel, sauf s’il a opté pour le statut d’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL) — supprimé depuis 2022, mais encore en vigueur pour ceux qui l’avaient adopté.
🔍 Pour savoir quels revenus vous pouvez toucher après un dépôt, lisez notre article sur l’indemnité chômage suite à un dépôt de bilan.

Illustration : un consultant indépendant liquidé sans avoir sécurisé ses biens voit ses économies saisies pour rembourser un prêt professionnel.
Comment se déroule un dépôt de bilan concrètement ?
Lorsqu’un entrepreneur individuel décide de déposer le bilan, il doit engager une procédure stricte et codifiée devant le tribunal de commerce (ou le tribunal judiciaire pour les professions libérales).
Voici comment cela se passe, étape par étape.
Étapes de la déclaration au greffe du tribunal
L’entrepreneur doit remplir une déclaration de cessation des paiements (formulaire Cerfa n°10530).
Cette démarche s’effectue dans les 45 jours suivant la date de cessation effective des paiements.
Une fois le dossier remis au greffe :
Un juge rapporteur est désigné
Une audience est convoquée rapidement
Le tribunal statue sur la procédure à ouvrir : redressement, liquidation ou rétablissement
À noter : un manquement à ce délai peut entraîner une faillite personnelle si le tribunal estime que le retard a aggravé la situation.
Documents à fournir, délais, audience avec le juge
Le dossier doit contenir :
Un état des dettes et créances
Un bilan actif/passif
Une liste des biens de l’entrepreneur
Les 3 derniers bilans comptables (si disponibles)
L’audience a généralement lieu dans les 15 jours suivant le dépôt. Elle se déroule à huis clos, mais peut être publique dans certains cas.
Exemple : une esthéticienne en EI liquidée après 45 jours de retard
Carole, esthéticienne à son compte, attend trop longtemps avant de déposer le bilan.
Résultat : le juge prononce une liquidation et retient une faute de gestion liée au retard. Elle est placée en faillite personnelle pour 5 ans, ce qui lui interdit de gérer une nouvelle activité.
Solutions concrètes pour limiter les dégâts
Le dépôt de bilan n’est jamais une formalité anodine.
Mais il existe des stratégies simples et efficaces pour en atténuer les conséquences, préserver vos droits et éviter les sanctions personnelles.
Tout commence par l’anticipation et le bon accompagnement.
Anticiper la procédure : diagnostic en amont
Avant que la trésorerie ne s’effondre complètement, il est utile de :
Faire un état précis des dettes (URSSAF, fournisseurs, prêt pro)
Identifier les charges compressibles
Évaluer les chances de rebond ou de cession d’activité
Un simple rendez-vous avec un avocat peut suffire à clarifier la situation et éviter des mois de stress inutile.
Se faire accompagner pour choisir la bonne option
Chaque procédure a ses spécificités.
Être conseillé par un avocat en procédures collectives permet de :
Choisir entre redressement, rétablissement ou liquidation
Préparer un dossier solide pour le tribunal
Négocier au mieux avec les créanciers
✅ Par exemple, un photographe a pu éviter la liquidation en préparant une demande de rétablissement professionnel avec son avocat.
Astuce : comment éviter la faillite personnelle en EI
La faillite personnelle est prononcée quand le juge estime que l’entrepreneur a aggravé volontairement sa situation (retard, confusion des comptes pro/perso, etc.).
Pour l’éviter :
Déclarez les difficultés dès les premiers signes
Séparez strictement vos finances personnelles et professionnelles
Tenez une comptabilité claire, même en micro-entreprise

Conclusion
Le dépôt de bilan d’une entreprise individuelle est une étape difficile, mais encadrée.
En comprenant les procédures possibles (rétablissement, redressement ou liquidation), les obligations de déclaration, et les risques personnels, l’entrepreneur peut agir de manière stratégique.
Si vous êtes concerné par un dépôt de bilan d’une entreprise individuelle, sachez qu’il existe des leviers pour préserver votre avenir, votre patrimoine, et repartir sur des bases solides.