Comment faire un dépôt de bilan étape par étape : une question que se posent chaque jour des dizaines de dirigeants en tension de trésorerie.
Quand les dettes deviennent insurmontables, que les paiements ne passent plus, l’urgence est là.
Et c’est justement parce qu’on se sent submergé qu’il est vital de suivre une méthode claire.
Dans cet article, nous détaillons toutes les étapes du dépôt de bilan — de l’analyse de votre situation à la décision du tribunal — pour vous aider à agir sans paniquer, avec rigueur et sang-froid.

Comprendre ce qu’est un dépôt de bilan (et pourquoi c’est urgent)
Déposer le bilan, c’est bien plus qu’un simple acte administratif.
C’est une démarche juridique cruciale pour signaler que votre entreprise ne peut plus faire face à ses dettes.
La définition juridique de la cessation des paiements
Le dépôt de bilan correspond à la déclaration de cessation des paiements.
Cette situation se définit légalement comme l’incapacité de régler le passif exigible (les dettes immédiates) avec l’actif disponible (trésorerie, créances, liquidités).
Exemple : un restaurateur ne peut plus payer ni ses fournisseurs ni ses charges sociales, malgré des relances. Il est en cessation des paiements.
Le délai légal des 45 jours : une obligation vitale
Une fois la cessation des paiements constatée, vous avez 45 jours pour effectuer la déclaration auprès du tribunal compétent.
Passé ce délai, vous vous exposez à de lourdes sanctions : faillite personnelle, interdiction de gérer, voire engagement sur vos biens personnels.
Ne rien faire dans les temps, c’est prendre le risque de ne plus avoir aucun contrôle sur les décisions.
Étape 1 – Analyser sa situation financière avec lucidité
Avant toute démarche auprès du tribunal, il est essentiel de faire un diagnostic honnête de la situation économique de votre entreprise.
Comment savoir si votre entreprise est en cessation des paiements
Posez-vous une seule question : "Puis-je faire face à mes dettes immédiates avec ce que j’ai en caisse ou en compte bancaire ?"
Si la réponse est non, et que les solutions (encaissements à venir, délais de paiement obtenus) sont inexistantes ou insuffisantes, vous êtes probablement en état de cessation des paiements.
Astuce : la présence de dettes sociales ou fiscales impayées depuis plusieurs semaines est souvent un signal fort.
L’importance de faire ce diagnostic avec un professionnel
Il est risqué de poser ce diagnostic seul.
Un expert-comptable ou un avocat spécialisé en procédures collectives peut vous aider à :
Vérifier objectivement l’état de cessation des paiements
Mesurer s’il est possible de négocier un accord amiable à la place
Estimer les conséquences concrètes selon les options disponibles
Mieux vaut 1 heure de conseil aujourd’hui qu’un redressement fiscal ou une responsabilité engagée demain.

Étape 2 – Préparer son dossier pour le tribunal
Une fois la cessation des paiements confirmée, il est temps de constituer un dossier complet pour déposer officiellement le bilan.
Les documents indispensables à réunir
Le tribunal attend un dossier solide et structuré.
Vous devrez fournir notamment :
Le formulaire Cerfa n°10530*02, dûment rempli
Un état chiffré des dettes et créances
Les comptes annuels les plus récents
La liste des salariés avec fonctions et contrats
Un résumé de la situation financière de l’entreprise
Conseil : une annexe explicative rédigée par votre avocat peut grandement clarifier votre position pour le juge.
Le formulaire Cerfa 10530*02 : mode d’emploi
Ce document officiel est le cœur de votre demande.
Il vous faudra y indiquer :
L’identité de la société
La date estimée de cessation des paiements
Le nombre de salariés
L’état de l’actif et du passif
Il est crucial de ne rien omettre ou sous-évaluer.
Toute erreur peut retarder le traitement du dossier… ou aggraver votre responsabilité.
Étape 3 – Déposer le dossier au greffe
Une fois le dossier prêt, il doit être déposé auprès du tribunal compétent, dans le respect des formes et délais légaux.
Où et comment déposer : tribunal de commerce ou judiciaire
Le lieu de dépôt dépend de votre statut :
Si vous êtes commerçant ou dirigeant d’une société : Tribunal de commerce
Si vous êtes artisan, profession libérale ou association : Tribunal judiciaire
Le dépôt peut se faire en personne au greffe ou en ligne via la plateforme officielle du ministère de la Justice.
Astuce : déposez une copie du dossier à votre avocat et gardez une trace écrite du dépôt (accusé de réception).
Délai, récépissé, précautions à prendre
Le greffier vous remettra un récépissé de dépôt, document essentiel en cas de litige ou de contrôle.
Il prouve que vous avez respecté le délai légal des 45 jours.
Ne dépassez jamais ce délai : c’est souvent ce qui déclenche les sanctions contre le dirigeant.
Étape 4 – Se présenter à l’audience
Après le dépôt de votre dossier, le tribunal vous convoquera pour une audience de constatation de la cessation des paiements.
C’est une étape déterminante.
Ce qui vous attend devant le juge
Lors de l’audience, vous devrez expliquer :
Les causes de vos difficultés financières
Les démarches déjà entreprises (recherche de financement, réduction des charges…)
Votre souhait d’obtenir un redressement ou, à défaut, une liquidation ordonnée
Le juge pourra poser des questions précises, notamment sur les flux bancaires récents, la relation avec les créanciers ou les actifs à céder.
Préparez cette audience comme un rendez-vous stratégique : votre capacité à démontrer votre bonne foi et votre anticipation peut influencer la suite.
Préparer sa défense : le rôle de l’avocat
Un avocat spécialisé en entreprises en difficulté est votre meilleur allié.
Il peut :
Structurer votre argumentaire
Fournir des éléments chiffrés supplémentaires
Éviter les maladresses verbales qui pourraient vous nuire
Défendre vos intérêts en cas de débat sur la date de cessation des paiements
Exemple : grâce à son avocat, un gérant de PME a pu démontrer qu’une avance client à venir rendait possible un redressement — il a obtenu un délai de trois mois pour redresser la situation.
Étape 5 – Ce que décide le tribunal après votre dépôt
À l’issue de l’audience, le tribunal rend un jugement d’ouverture de procédure collective.
Cette décision a des conséquences immédiates sur la gestion de l’entreprise.
Redressement judiciaire ou liquidation : comment c’est tranché
Deux issues sont possibles :
Redressement judiciaire : si une poursuite d’activité semble possible, un administrateur judiciaire peut être nommé pour élaborer un plan d’apurement des dettes sur plusieurs années.
Liquidation judiciaire : si la situation est irrémédiablement compromise, l’entreprise cesse son activité et ses biens sont vendus pour payer les créanciers.
Le juge s’appuie sur les pièces fournies, l’état de la trésorerie et le potentiel de l’activité pour choisir l’une ou l’autre option.
Ce que cela implique pour vous en pratique
Dans les deux cas :
Vos créanciers ne peuvent plus agir individuellement
Les contrats en cours peuvent être résiliés ou maintenus
Un mandataire judiciaire prend la main sur les finances
Vous êtes tenu de coopérer activement avec l’administrateur ou le liquidateur
Témoignage : un entrepreneur multisite a pu sauver 3 de ses 5 établissements grâce à une liquidation partielle négociée avec son avocat.
Et après ? Vos droits, vos obligations, vos solutions
Le dépôt de bilan n’est pas un point final.
Il ouvre une nouvelle phase où vous conservez des marges de manœuvre… à condition d’être bien accompagné.
Ce que vous pouvez encore sauver (activité, emploi, patrimoine)
Même en liquidation, il est parfois possible de :
Sauver une partie de l’activité via une cession partielle à un repreneur
Préserver certains biens personnels, notamment si vous êtes entrepreneur individuel sous statut EIRL ou si vous avez effectué une déclaration d’insaisissabilité
Maintenir temporairement des emplois essentiels le temps de la procédure
Exemple : une dirigeante de start-up a pu vendre son portefeuille clients avant liquidation, permettant à 6 salariés d’être réembauchés par le repreneur.
Comment bien s’entourer pour éviter les erreurs
C’est à ce stade que les conseils spécialisés font toute la différence.
En sollicitant :
Un avocat en droit des entreprises en difficulté, vous assurez votre défense en cas de litige ou de mise en cause de votre gestion.
Un expert-comptable, vous gardez la main sur les chiffres, anticipez les taxes résiduelles et préparez éventuellement une nouvelle activité.
Une erreur de stratégie post-dépôt peut vous suivre pendant des années. Mieux vaut investir dans un accompagnement solide que subir les conséquences d’un faux pas.

Conclusion
Faire un dépôt de bilan est un acte fort, mais ce n’est pas la fin.
C’est une procédure qui, si elle est bien conduite, permet de geler les dettes, protéger l’essentiel, et parfois même de repartir sur des bases saines.
Ce guide vous a présenté, étape par étape, comment préparer, déposer et gérer cette déclaration.
Mais au-delà des formalités, c’est votre avenir de dirigeant qui est en jeu.
Et vous n’avez pas à traverser cette épreuve seul.